Histoires insolites : le jour où Toyota sauva Porsche

Parmi les histoires insolites de l’industrie automobile, Porsche fut sauvée de la faillite par le savoir-faire de Toyota. Une histoire peu connue, mais les ingénieurs japonais évitèrent la disparition du constructeur allemand.

Texte : Gaël Angleviel / Images : Porsche AG.

La firme Porsche sauvée par Toyota dans les années 90

Si Porsche est aujourd’hui une entreprise florissante, et a littéralement battu des records de rentabilité au milieu des années 2000 / 2010, cela n’a pas toujours été le cas. C’était même tout l’inverse, car au début des années 90, la firme de Stuttgart fut proche de la faillite. On y voyait des scènes où les usines étaient en plein chaos. Les ouvriers quittaient leur poste furieux, et les managers perdaient rapidement leurs nerfs. Les voix couvraient le bruit des machines et des outils sur la chaîne de production, créant une atmosphère tendue.

Pour comprendre ces tensions, il faut regarder les ventes de l’époque. Car, de 50 000 unités écoulées en 1986, l’entreprise n’en vendait plus que 14 000 en 1993. Et c’était seulement 3 000 modèles qui trouvèrent preneur aux USA la même année. Ainsi, le constructeur eut besoin d’un nouveau modèle pour remplacer le trio 924 / 944 / 968 vieillissant. Et c’est chez les Japonais de Mazda que l’inspiration viendra avec la Miata (MX5). Lancée en 1989, la voiture de sport de Mazda avait prouvé qu’il existait un marché solide pour les roadsters à deux places. Stuttgart a donc décidé de faire quelque chose de similaire, mais avec une touche Porsche. Cette nouvelle voiture serait donc un roadster à moteur central rappelant la 550 Spyder des années 1950.

Porsche sous les conseils de Toyota…

Le directoire était ainsi convaincu qu’un roadster relativement bon marché était ce dont avait besoin l’entreprise. Cependant, il fallait trouver un moyen efficace pour construire la voiture. C’est alors que les ingénieurs Toyota arrivent dans l’équation. C’est en 1992 que les Japonais sont sollicités, ainsi que leur méthode de travail « Just-in-time ». Cette philosophie, qui prône l’élimination totale du gaspillage, consiste à ne construire que ce qui est nécessaire, quand cela est nécessaire et dans la quantité exacte nécessaire. Cette méthode s’applique également à l’approvisionnement en pièces détachées. En suivant ces lignes directrices, Toyota a éliminé les incohérences et les inefficacités, ce qui a permis d’améliorer la productivité et de réduire les coûts.

Mais quand les ingénieurs Toyota arrivent chez Porsche, ils ont à déplorer plusieurs choses. Ils pointaient du doigt toutes les failles, exigeant des explications sans ménager les employés allemands. Ils donnaient des conseils et critiquaient sévèrement la qualité du travail réalisé, remettant en question le savoir-faire des employés Porsche. L’orgueil des teutons allait-il s’incliner face à l’efficacité japonaise ? En quelque sorte, mais c’était vital pour la survie de Porsche. L’entreprise, symbole de performance automobile en Allemagne, jouait sa survie et devait s’adapter pour éviter la faillite. Se tourner vers les Japonais et leurs techniques de production « adaptée » était la seule solution pour redevenir rentable.

Avant l’intervention des Japonais, les ingénieurs allemands devaient chercher dans des bacs de pièces détachées et grimper sur des échelles pour fouiller les étagères lors de la construction d’une seule voiture. L’impact de l’équipe Toyota a été rapide et évident. Après avoir mis en place des méthodes de production allégées, Porsche a déclaré avoir réduit le temps d’assemblage d’une voiture de 120 heures à 72 heures, et le nombre d’erreurs par voiture a chuté de 50 %, ce qui est stupéfiant.

Réapprendre ou risquer de tout vendre à la concurrence

Sans cela, Porsche risquait un rachat par BMW, Mercedes-Benz ou Volkswagen, une menace qui planait depuis plusieurs années. « Ce fut un immense choc d’accepter ces Japonais incapables de parler notre langue et nous donnant des ordres », explique Wendelin Wiedeking, alors PDG de Porsche et âgé de 43 ans. Pour lui, ces ingénieurs étaient durs et impitoyables avec les équipes. « Mais nous voulions cela », précise-t-il, soulignant que cette rigueur était essentielle pour la transformation de l’entreprise. L’adoption des techniques de production japonaises par Porsche a eu un impact majeur bien au-delà de l’entreprise elle-même.

Depuis des années, les constructeurs allemands tentaient d’imiter l’efficacité japonaise, mais avec des résultats très limités. Les travailleurs allemands, bien payés, refusaient souvent d’adopter plus de flexibilité, freinant l’évolution des méthodes de production. Cette rigidité poussait certains dirigeants à affirmer qu’ils ne construiraient plus d’usines automobiles en Allemagne à l’avenir.

« Face au Japon, l’Allemagne disait : ‘Nous ne pouvons pas le faire ici, nous ne le ferons pas' », explique Daniel T. Jones. Ce professeur à la Cardiff Business School estime que Porsche n’avait pas le choix et devait s’adapter pour survivre. Dès lors, il devient difficile pour les autres constructeurs de ne pas suivre cet exemple et d’ignorer cette réussite. Des tensions ont émergé, mais Porsche a survécu. L’entreprise est restée une référence et a conservé son indépendance.

Page 2 : Le temps des nouvelles méthodes pour Porsche

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