12 Heures de Sebring : répétition pour Le Mans ?

On entend toujours dire que les 6 Heures de Spa, début mai, constituent la répétition générale en vue du double tour d’horloge sarthois, en juin. Mais les 12 Heures de Sebring, qui se sont déroulés le week-end dernier, représentent également un terrain de jeu propice à la préparation de la plus grande course d’endurance du monde.

Didier LAURENT

En 1999, BMW débarque en Endurance avec une version fort améliorée de sa LMP900, la V12 LMR. L’objectif de la firme munichoise, c’est bien évidemment les 24 Heures du Mans. Et pour préparer son excursion en terre sarthoise, décision est prise d’aligner l’auto au départ des 12 Heures de Sebring. Petit tracé de seulement 6,021 km pourvu d’un revêtement défoncé mêlant asphalte et béton, le Sebring International Raceway n’a pourtant rien en commun avec le billard de près de quatorze kilomètres servant de terrain de jeu aux protos du Mans. BMW avait alors justifié son choix en assurant « qu’une voiture bouclant 12 heures de course à Sebring est parée pour affronter une épreuve de 24 heures partout ailleurs. »

Aston Martin Valkyrie #23 : Ross Gunn, Roman De Angelis, Alex Riberas

Et l’histoire lui a donné raison ! Lauréate du tour d’horloge floridien, la V12 LMR offrait au constructeur bavarois son unique succès au Mans trois mois plus tard. « Pour mettre à l’épreuve la mécanique d’une voiture, pour tester sa robustesse, il n’y a pas mieux que Sebring, indique Pierre Alves, manager des programmes Endurance de Michelin Motorsport, qui fournit 100 % des voitures de l’IMSA, et la catégorie Hypercar en WEC. « Le circuit est tracé sur une ancienne base d’entraînement de l’US Army et se compose d’un patchwork de revêtements composé de plaques de béton à de l’asphalte ancien ou neuf selon les portions. C’est un circuit très bosselé, avec des raccords approximatifs entre les plaques de béton, mais également très rapide. Tout cela rend les réglages des voitures très complexes. »

Plus de 5 m de débattement de suspension…

Sur un tour du Sebring International Raceway (long de 6,019 km), le débattement cumulé d’une suspension est de 5,18 m… C’est de loin le plus impressionnant de la saison concernant cette donnée. Au Mans, le chiffre atteint 6 m, mais sur un circuit plus de deux fois plus long (13,626 km). Les relances sont aussi nombreuses : les pilotes appuient neuf fois par tour sur la pédale de frein, soit – selon la catégorie -, entre 2 800 et 3 000 fois tout au long des 12 heures de course. A titre de comparaison ce n’est que 800 à 1000 de moins qu’aux 24 Heures de Daytona. « L’an passé, j’ai fait deux relais et demi, et quand je suis ressorti, j’étais rincé » se remémore Mathieu Jaminet, qui partage le volant de la 963 n°6 du Porsche Penske Motorsport avec Kévin Estre et Matt Campbell.

BMW M4 GT3 EVO #1 : Madison Snow, Neil Verhagen, Connor De Phillipi

D’une manière générale, les pilotes comparent un relais sur le tracé floridien à une épreuve d’une longueur au moins doublée sur un autre circuit. Jordan Taylor, inscrit sur la Cadillac V-Series.R n°40 du Wayne Taylor Racing, l’illustre de cette manière : « À Sebring, quand on te parle de faire un double relais, tous les pilotes sont un peu stressés par ce qu’ils vont endurer, surtout en pleine chaleur. Vous ne vous battez pas seulement contre les éléments, mais aussi contre la voiture tout en devant gérer les pneumatiques et le carburant. Le côté physique ajouté au côté mental est extrêmement épuisant. A Daytona, on peut boucler un relais nocturne de trois heures et en sortir frais comme un gardon

Michelin adoucit les bosses

Est-ce à dire que les pneumatiques souffrent plus qu’ailleurs ? « Conscient des contraintes uniques offertes par cette piste, nous les prenons en compte quand on travaille sur la carcasse de nos pneus, indique Pierre Alvès. Nous organisons d’ailleurs une séance de développement de la gamme Hypercar / GTP 2026 ici-même quelques jours après la course. Si le pneu souffre en surface, le revêtement de Sebring ne fatigue pas la carcasse. Par ailleurs, pour aider la voiture à moins subir les bosses, nous préconisons une pression peu élevée (1,7 bar, Ndlr). Côté Michelin, en revanche, c’est compliqué de comparer frontalement Sebring aux 24 Heures du Mans car les contraintes sont différentes. Pour les voitures, en revanche, il n’y a pas mieux que ce circuit pour tester la robustesse de la mécanique, et chacun sait que le pneumatique joue à fond son rôle d’amortisseur, et n’agit pas seulement sur le comportement de la voiture. »

A la question de savoir si en 2025 une voiture bouclant 12 heures de course à Sebring est parée pour affronter une épreuve de 24 heures partout ailleurs Adam Carter, le responsable des programmes Endurance d’Aston Martin, tient à apporter son éclairage : « C’est tout sauf un hasard si nous avons décidé de rester après la course pour mener à bien un test d’Endurance, car a priori cela peut s’avérer payant. » Après BMW, cette stratégie a aussi été adoptée chaque année par Audi au début des années 2000, avec le succès que l’on connaît. Du côté d’Aston Martin, la Valkyrie n’avait jusque-là jamais bouclé un double tour d’horloge. Son escapade floridienne, qui s’est soldée par une 9ème place, est donc un bon entrainement pour les 24 Heures du Mans. Quant à la victoire de la Porsche 963 #7 de Felipe Nasr, Nick Tandy et Laurens Vanthoor, devant la voiture soeur #6 (comme à Daytona fin janvier) faut-il y voir un signe prémonitoire ? Réponse, le 15 juin prochain à 16 heures, lors du drapeau à damiers.

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