Les permis de conduire étrangers

Pour le Code de la route, la nationalité a d’importantes conséquences juridiques.

Que vous soyez Ukrainien, Danois ou Français, ce n’est pas votre nationalité qui compte mais surtout celle de votre permis de conduire. Notre droit distingue selon que votre permis est français, européen ou hors Union Européenne. Évidemment, ce qui intéresse tout un chacun est d’abord de savoir si des poursuites seront possibles et quelles peines pourront être appliquées en cas d’infraction commise sur le territoire français.

Répondre à cette question suppose de répondre à une première question moins évidente qu’elle n’y paraît.

Est-il légal de détenir et d’utiliser un permis de conduire étranger pour conduire en France ?

La réponse est « oui ». Si la personne est titulaire d’un permis délivré par un Etat membre de l’UE, elle n’a même pas l’obligation de faire l’échange avec un permis français même lorsque sa résidence habituelle est en France, c’est-à-dire lorsque la personne vit au moins 185 jours par an sur le territoire français, sous réserve de l’enregistrement en préfecture du permis de conduire étranger dont la validité sera sommairement vérifiée (article R 222-1 code de la route).

La réponse est « non » si : (1) cette même personne a commis une infraction au Code de la route ayant entrainé une mesure de restriction, de suspension, de retrait, d’annulation du droit de conduire, de retrait de points. L’échange est dans ce cas obligatoire sous peine d’une amende contraventionnelle de quatrième classe, article R 222-2 Code de la route, laquelle n’entraîne pas de retrait de points par hypothèse impossible sur un permis de conduire étranger… (2) La personne est titulaire d’un permis délivré par un Etat hors UE. Dans ce dernier cas, le permis sera valable un an, délai pendant lequel le permis de conduire sera en principe échangé sans que le titulaire ne passe le code et l’épreuve pratique (article R 222-3 du code de la route). Au-delà de ce délai, et à défaut d’échange, le permis perdra sa validité.

En cas d’infraction au code de la route, quelles sanctions avec un permis de conduire étranger?

Les points ne peuvent pas être retirés sur un permis étranger, quel qu’il soit (UE ou hors UE). L’automobiliste restera redevable de l’amende et donc passible de poursuites. Cependant, si sa résidence n’est pas en France, il sera difficile voire impossible de le poursuivre et de faire exécuter la sanction.

Il faut noter qu’un permis de conduire étranger peut, comme un permis de conduire français, être suspendu administrativement par le préfet en cas d’infraction grave à la différence – importante -près qu’il ne pourra pas être retenu si l’automobiliste justifie de la nécessité de se déplacer à l’étranger (Cass. Crim. 1er décembre 1980).

Il en est de même pour la peine complémentaire de suspension judiciaire du permis de conduire : la personne qui fait l’objet de cette mesure ne peut plus conduire en France pendant le temps de la suspension. Cependant, la sanction ne saurait produire ses effets en dehors de nos frontières et empêcher l’automobiliste de conduire à l’étranger. Pour cette même raison et faute d’harmonisation entre les législations, le juge français n’a pas le pouvoir d’annuler un permis de conduire étranger même s’il peut interdire à l’automobiliste de conduire en France pendant un temps ne dépassant pas 3 ans.

Quid des personnes titulaires de deux permis ?

Détenir deux permis, un français et un étranger, n’est bien entendu pas interdit pourvu que l’on ait subi avec succès les épreuves théoriques et pratiques dans les deux pays concernés. Précisons toutefois qu’il n’est pas possible d’échanger un permis français qui aurait été annulé contre un permis étranger, même européen. Dans ce cas, vous serez considéré comme conduisant sur le sol français sans permis.

On l’a vu, l’automobiliste dont le permis français a été annulé pour solde de points nul ou à la suite du prononcé d’une peine d’annulation, de suspension ou d’interdiction doit obligatoirement procéder à l’échange de son permis étranger délivré par un pays membre de l’UE avec un permis français pour permettre l’exécution de la mesure sous peine de contravention de 4e catégorie. Surtout, l’invalidation du permis de conduire français entraînera nécessairement l’interdiction du droit de conduire sur le territoire national français quand bien même l’automobiliste serait-il titulaire d’un permis délivré par un autre Etat ou d’un permis international (Cass. Crim. 14 mai 2008).

Conclusion : si votre permis est annulé, vous devrez le repasser… En France.

Me Teissedre,  Avocat au Barreau de Montpellier

Membre de la commission juridique de 40 Millions d’Automobilistes

avocat.sport.cars@gmail.com