6 H de Spa : Second succès pour Audi, forte impression de Porsche

Enorme succès pour la seconde manche du championnat du monde d’Endurance qui, malgré les intempéries, a réuni 500 journalistes et 54 000 spectateurs sur le circuit de Spa-Francorchamps.

07 FASSLER Marcel (CHE) LOTTERER Andre (GER) TRELUYER Benoit (FRA) AUDI R18 ETron Quattro team Audi Sport Joest 18 DUMAS Romain (FRA) JANI Neel (CHE) LIEB Marc (GER) PORSCHE 919 hybrid team Porsche action during the 2015 FIA WEC World Endurance Championship, 6 Hours of Spa from May 1st to 3rd  2015, at Spa Francorchamps, Belgium. Photo Florent Gooden / DPPI

07 FASSLER Marcel (CHE) LOTTERER Andre (GER) TRELUYER Benoit (FRA) AUDI R18 ETron Quattro team Audi Sport Photo Florent Gooden / DPPI

L’immense paddock est rempli des camions et structures modernes des teams, et tout cela impressionne. Pas de doute, le FIA WEC est devenu un championnat d’envergure. Dès le jeudi, alors que la course a lieu le samedi, la salle de presse, l’endroit depuis lequel les journalistes envoient leurs articles, est presque pleine, chacun ayant bravé les intempéries afin de venir regarder s’affronter ces pilotes aguerris au volant de leurs drôles de machine. Car si la Formula E apporte son lot d’innovation en faisant rouler pour la première fois dans un championnat de niveau mondial des monoplaces électriques, et que la F1 s’est aussi mise plus ou moins au goût du jour en adoptant des motorisations 1.6 Turbo et des récupérateurs d’énergies en tous genres, les prototypes LM P1 ont fait le choix de divers systèmes hybrides. Il s’agit d’engins impressionnants de style comme de technologie, et qui constituent un très beau plateau. Audi, Porsche et Toyota sont déjà engagés, et seront rejoints -cette fois il semblerait que c’est sûr- par une Nissan très curieuse à partir des 24 H du Mans, en juin prochain.

En attendant, le spectacle a été éblouissant sur le toboggan des Ardennes, le fameux circuit de Spa-Francorchamps, considéré comme l’un des plus beaux tracés du monde. Ce championnat présente également la particularité de faire courir plusieurs catégories de voitures en même temps : LMP1 hybrides ou thermiques, LMP2 (uniquement thermiques), puis des GT (Ferrari, Aston Martin, Corvette) confiées à des pilotes professionnels ou amateurs. A Spa, 34 voitures étaient donc réunies sur la ligne de départ, devant une foule venue nombreuse malgré la météo maussade, pour voir l’une des courses les plus excitantes de l’année. La première journée d’essais, qui s’est déroulée sous une pluie torrentielle, a été le théâtre d’un accident entre une Toyota et une Audi, qui a conduit le pilote Toyota Nakajima à déclarer forfait pour la course et sûrement plus, le japonais s’étant cassé une vertèbre.

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Porsche plus vite que les autres

18 DUMAS Romain (FRA) JANI Neel (CHE) LIEB Marc (GER) PORSCHE 919 hybrid team Porsche action pitstop during the 2015 FIA WEC World Endurance Championship, 6 Hours of Spa from May 1st to 3rd  2015, at Spa Francorchamps, Belgium. Photo Florent Gooden / DPPI

18 DUMAS Romain (FRA) JANI Neel (CHE) LIEB Marc (GER) PORSCHE 919 hybrid team Porsche. Photo Florent Gooden / DPPI

Et c’est Porsche qui tire les marrons du feu en réalisant le meilleur des essais libres, avec un tour bouclé en 2 min 16.616 sec pour la numéro 18 de Dumas/Jani/Lieb.

Le lendemain, jour de la fête du travail, la pluie avait cédé la place à un temps sec et plus clair. Sur un sol asséché par le vent, et une température extérieure à peine supérieure à 10 °C, les concurrents descendent facilement en-dessous des deux minutes au tour, avec 1 min 57,368 s pour l’Audi n°7 de Fassler/Lotterer et Treluyer, seulement 9 millième devant la Porsche n°19 de Hülkenberg/Bamber/Tandy et des deux autres Porsche. Les qualifications, en fin de journée, se sont déroulées sous un beau soleil et viendront confirmer les performances des Porsche, celles-ci réalisant les trois meilleurs temps ! Pole position pour la numéro 17 de Bernhard/Webber/Hartley, avec un chrono canon de 1min 54,755 s (soit 5 s de mieux que la pole de l’année dernière !), suivie de la 19 et de la 18. Deux Audi (numéros 7 et 8) se placent juste derrière, devant les deux Toyota (numéros 1 et 2) et la troisième Audi. La dernière LM P1, thermique, du team Bykolles, se classe logiquement 9ème.

Une course de toute beauté

Start during the 2015 FIA WEC World Endurance Championship, 6 Hours of Spa from May 1st to 3rd  2015, at Spa Francorchamps, Belgium. Photo Clement Marin / DPPI

Photo Clement Marin / DPPI

Le samedi, c’est sous un soleil timide mais dans une ambiance très sympathique et avec beaucoup de monde que s’est déroulée la journée de course. Une heure avant le début de la course, de nombreux VIP et invités ont pu accéder à la ligne de départ pour admirer les bolides qui allaient en découdre durant 6 heures, mais aussi faire des photos avec les pilotes, notamment l’acteur américain Patrick Dempsey, de nombreuses personnalités du monde du spectacle,  l’ancien coureur cycliste Eddy Merckx ou encore le pilote Jacky Ickx et sa fille Vanina.

A 14H30 précises, les voitures se sont élancées à l’issue d’un tour parcouru derrière la voiture de sécurité. Et dès les premiers virages, la bagarre fait rage dans les différentes catégories. En LMP1, Audi double la troisième Porsche dès la fin du premier tour, alors que derrière, la Ligier JS de G-Drive pilotée par le britannique Sam Bird marque la Signatech-Alpine de Nelson Panciatici à la culotte. Il finira par le passer puis s’installer en tête de la catégorie. La Porsche n°19, qui tentera de passer à l’intérieur du virage pour doubler une Porsche 911 du Team Manthey, l’accrochera et enverra les deux voitures hors de la piste, sans conséquence de carrosserie pour la GT, mais avec une obligation de repasser par les stands pour la LM P1, celle-ci ayant perdu son capot. Curieusement, ce sera la GT qui sera sanctionné, alors qu’elle était sur sa trajectoire… La direction de course a sûrement ses (bonnes) raisons.  Pendant ce temps, la Porsche N° 17 rate un freinage, tire tout droit mais repartira sans dommage après avoir contourné des barrières de sécurité, encaissé une pénalité et perdu presque un tour dans l’opération. Les deux Toyota doublent leur relais de pneumatiques, car les LMP1 ne disposent que de six trains de pneus pour huit relais. Elles espèrent en tirer les bénéfices plus tard.

Après une première heure de course animée, Deux Porsche, deux Audi et deux Toyota composent la tête de la course. En LMP2, c’est la G-Drive de Sam Bird qui domine les débats. A l’avant, la bataille continue et les pénalités tombent suite aux accrochages et manouvres des uns et des autres. Au bout de deux heures de course, il n’y a plus qu’une Porsche en tête, la numéro 18 alors pilotée par le français Romain Dumas. Elle est suivie par les trois Audi (numéros 7, 8 et 9) et les deux Toyota. Les deux autres Porsche ferment alors la marche des LMP1 hybrides. En LMP2, c’est la Gibson-Nissan de Jota Sport qui devance des deux Ligier de G-Drive. Le trio de pilotes français de la Signatech Alpine est cinquième.

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Le pneu en question

08 DUVAL Loic (FRA) DI GRASSI Lucas (BRA) JARVIS Oliver (GBR) AUDI R18 ETron Quattro team Audi Sport Joest action pitstop during the 2015 FIA WEC World Endurance Championship, 6 Hours of Spa from May 1st to 3rd  2015, at Spa Francorchamps, Belgium. Photo Florent Gooden / DPPI

08 DUVAL Loic (FRA) DI GRASSI Lucas (BRA) JARVIS Oliver (GBR) AUDI R18 ETron Quattro team Audi Sport Joest. Photo Florent Gooden / DPPI

C’est alors que la stratégie pneumatique devient un élément important pour la victoire. Devant obligatoirement doubler des relais, les équipes doivent choisir les meilleurs moments pour le faire, afin de distancer ou de reprendre du temps à ses adversaires. Une vingtaine de secondes sépare un arrêt au stand avec changement de pneu d’un autre. Mais encore faut-il que les pneus soient capables d’encaisser deux relais… C’est non seulement le cas, mais c’est même en partie ce qui a fait gagner l’Audi N°7…

Voici comment : C’est Toyota Racing qui ouvre la série des doubles relais au 21° tour, quand Alexander Wurz, au volant de la Toyota n°2, s’arrête aux stands et repart 1 min 04 s plus tard en gardant les pneus du côté gauche de sa voiture. Il est suivi au 22° tour par Sébastien Buemi, sur la Toyota n°1, qui ne change pas de pneumatiques et retrouve la piste après seulement 54 s d’arrêt. Ainsi, il réalise une économie d’environ 20 secondes, et peut continuer à se battre pour la victoire.

Audi aussi

Quant à Audi Sport, c’est Marco Bonanomi, sur l’Audi n°9, qui inaugure les doubles relais au 47° tour, lors de son deuxième arrêt aux stands. Le pilote italien valide ainsi la stratégie des pneumatiques pour l’équipe, qui est  en train de décider si doubler les relais avec les autres voitures. A ce moment-là, les Audi n°7 et n°8 évoluent à une vingtaine de secondes des Porsche n°17 et 18, et une stratégie de double relais doubles peut leur permettre de combler ce retard.

Le coup de théâtre se produit au 94° tour, quand l’Audi n°7 accuse un retard de 21 secondes sur la Porsche n°18 (la n°17 ayant été ralentie par une pénalité de 10 secondes) : André Lotterer attend que la Porsche de Marc Lieb termine son 4° pit-stop, qui dure 1’22’’, pour rentrer aux stands. Son Audi retourne en piste 54’’ seulement après son arrêt : Lotterer double les relais avec ses pneus, ce qui lui permet de prendre la tête de la course après 3 heures de domination des Porsche.

C’est donc sur l’efficacité de cette décision qu’Audi Sport a bâti son succès. Toutes les têtes sont à ce moment-là tournées vers les écrans, pour comprendre si le pilote allemand parviendra à résister au retour de son compatriote de Porsche. Mais une chose est sûre : si au prochain ravitaillement l’Audi n°7 parvient à s’arrêter en leader, la stratégie des doubles relais avec les pneus lui ouvrira les portes de la victoire.

Porsche Team comprend alors qu’il faut réagir en comptant sur la constance des pneus Michelin : au 118° tour, Marc Lieb s’arrête aux stands et reprend la piste après 49’’. Son double relais démarre, même si la firme de Stuttgart décide de le raccourcir par rapport à ses cousins d’Ingolstadt (il aura parcouru moins de 20 tours). En économisant le temps de chargement des pneus, la Porsche  n°18 retrouve la tête de la course, tandis que l’Audi n°7, passée aux mains de Benoît Tréluyer, est maintenant à sa poursuite. Dans l’espace de 12 tours, le Français reprend 23’’ à Lieb et, au 130° tour, il parvient à le dépasser. La bataille des pit-stops reprend. La Porsche n°18 fait son 6° arrêt aux stands, Lieb laisse la place à Neel Jani. La voiture fait le plein de carburant et change de pneus. Dans le camp Audi, Tréluyer s’arrête au 141° tour et double les relais avec ses pneus. L’Audi n°7 semble donc s’envoler vers la victoire, mais Jani ne cède pas. Il enchaine des tours très rapides, il reprend le pilote français et le dépasse ! Mais les jeux ne sont pas encore faits : le dernier qui s’arrêtera est celui qui aura le plus de chances de victoire.

Une fin haletante

A une demi-heure à la fin de l’épreuve, quand Neel Jani amène sa Porsche 919 Hybrid vers son stand pour le dernier ravitaillement. L’arrêt ne dure que 51’’… mais l’Audi n°7 reste sur la piste. Elle dispose de 50’’ d’avance quand Jani repart. Elle ne s’arrêtera que 8 tours plus tard, durant 42’’ seulement, pour revenir en piste en leader du peloton. Les dix dernières tours consacrent le trio Fässler/Lotterer/Tréluyer et l’Audi N°7 comme les gagnants de l’édition 2015 des 6 Heures de Spa.

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