Essai Nissan GT-R Nismo 2020 : Au volant de la GT-R ultime

Utilisant des pièces issues de la compétition, la GT-R n’avait jamais été aussi loin dans la recherche de performance. Sur route, mais surtout sur piste cela donne un engin très abouti, à la croisée des chemins entre bolide civilisé et voiture de course.

Depuis sa commercialisation, en 2007, la GT-R a fait environ 1 000 heureux sur le marché français. La version Nismo beaucoup moins, et ce millésime 2020 échappé des circuits comptera ses propriétaires sur les doigts d’une main. Pour des questions de disponibilité –la voiture y compris son moteur sont assemblés à la main- mais aussi parce que cette super GT-R est proposée au prix de… 210 000 €, avec des pièces issues de l’usine Nismo (similaires à celles employées en compétition client, en catégorie GT3). Pour mémoire, à la fin des années 2000 une GT-R de base coûtait environ 80 000 €, et aujourd’hui l’entrée de gamme est basée à 103 000 €, hors malus.

Une version très spéciale 

Cette version Nismo très élaborée se distingue de la GT-R « normale » par l’emploi à outrance du carbone : boucliers avant et arrière, ailes avant, capot, toit, seuils de portière, coffre et spoiler arrière sont habillés de ce matériau fréquemment utilisé en course. Cela permet bien sûr de travailler la notion d’exclusivité, mais aussi d’alléger la voiture et d’améliorer son aérodynamique. Au total, la voiture pèse 30 kg de moins, grâce à l’emploi du carbone mais aussi à un travail réalisé sur les matériaux qui composent d’autres pièces.

En termes de design, certaines parties, comme les ouïes d’aération dans les ailes, sont directement inspirées de la GT-R GT3. Plus que le style et leur capacité de refroidissement, elles répartissent le flux d’air le long de la carrosserie, en évitant des perturbations supplémentaires avec des pièces arrières, largement sculptées pour favoriser l’appui à haute vitesse. La forme du toit, également en fibre de carbone, a légèrement évolué mais ne dénature pas le style atypique de la voiture. Rien ne ressemble à une GT-R.

Le style, c’est aussi les jantes : allégées, d’une taille de 20 pouces, elles reçoivent de nouveaux pneus Dunlop au taux d’entaillement abaissé. Selon Nissan, cela leur permet de profiter d’une surface de contact au sol augmentée de 11 %. Sur route sèche, le gain est évident. Mais le pneu est très souvent une question de compromis : sur le mouillé, ces pneus semi-slicks deviendront vite des planches de surf, transmission intégrale ou pas… 

Une pièce de choix sous le capot

Depuis 2007, la GT-R a toujours été équipée d’un moteur V6 3.8 biturbo. Mais celui de la version Nismo est fabriqué à la main par un maître artisan, et reçoit les deux turbos provenant des livrées GT3 en compétition clients. Leur turbine est spécifique, et comporte moins d’aubes. La puissance maximale ne change pas (600 ch à 7 100 trs/mn) mais ces turbos spécifiques augmentent de 20 % la réactivité des turbos à l’accélération. La valeur de couple (652 Nm à partir de 3 600 trs/mn) termine de rentre la fiche technique de la GT-R Nismo très alléchante.

Pour ralentir l’engin, Nissan équipe pour la première fois l’un de ses modèles de sport de freins carbone-céramique Brembo. Les disques avant sont énormes -410 mm- et pincés par des étriers de couleur jaune à 6 pistons. A l’arrière, les disques de 390 mm sont quant à eux mordus de 4 pistons. Plus que la taille ou le matériau, c’est tout le système de frein, sa vitesse de fonctionnement, son poids, qui ont été repensés pour améliorer le temps de réaction et les performances globales. Très rigide, l’ensemble résiste à des températures dépassant les 1 000°C et, sur route, à démontré un niveau d’efficacité rare pour une voiture de série.

La boîte aussi (automatique à double embrayage, six rapports) est tournée vers davantage de performance avec un mode Racing qui accélère le passage des vitesses et les sélectionne avec plus de finesse, notamment en sortie de virage. Plus que des améliorations point par point, c’est l’ensemble de la voiture qui a été revu pour la rendre vraiment différente de l’ancienne version Nismo. Les réglages, bien sûr, mais aussi tout le travail fait par le département compétition pour adapter ses technologies à une voiture de course homologuée pour la route.

Une expérience de conduite extraordinaire

Ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de profiter dans la durée (près d’une semaine dans notre cas), d’une voiture aussi pointue qui réclame d’être conduite longtemps et dans plusieurs configurations pour être comprise. Car de prime abord, si le style extérieur force le respect, voire impressionne, l’intérieur répond à des standards de design dépassé, mais qui dégagent indéniablement un ambiance course. Hormis l’emploi à outrance d’alcantara, lequel est du plus bel effet sur l’ensemble de la planche de bord et une bonne partie de l’habitacle, les autres plastiques et boutons de commande sont basiques et dépassés. Même le système multimédia, qui a progressé au fil du temps, accuse un retard en comparaison de ce qu’on trouve actuellement sur le marché. Mais tout cela n’a pas beaucoup d’importance, d’autant que lorsqu’on pousse le bouton Start le ton est donné. Le son n’est pas le plus rauque ou le plus captivant, mais il laisse deviner le potentiel et la finesse équilibrée d’un V6 doublement suralimenté. Les premiers kilomètres, en milieu urbain, conduisent à basculer les suspensions de Normal à Confort, pour essayer de limiter la facture chez l’ostéopathe après un essai de plusieurs centaines de kilomètres. Les premières accélérations et quelques enchainements de virage distillent vraiment des sensations de voiture de course.

La filiation avec des GT3 de circuit est évidente, même si la GT-R reste une voiture apte à évoluer sur route. Il parait même que les sièges arrière, au dossier incliné, sont vastes et confortables. Il parait aussi, grâce aux montres connectées très répandues aujourd’hui, que le pouls accélère franchement lorsque la pédale de droite est enfoncée. Par pour les quelques centimètres parcourus par cette pièce de métal, mais pour l’interprétation qui en est faire par la voiture… Le moins que l’on puisse dire, c’est que ça pousse. Mais, curieusement, ce n’est pas le plus impressionnant.

Certes, 600 ch sur quatre roues motrices, c’est fou d’adhérence et de puissance. Mais que dire des vitesses de passages en courbe, de la motricité et surtout des freinages ! Oubliez vos repères, freinez systématiquement plus tard, et vous vous arrêterez malgré tout plus tôt. La GT-R Nismo 2020 dispose certainement de l’un des meilleurs systèmes de freinage du marché. Certes exclusifs, certes très cher à remplacer (ils sont très résistants mais des cailloux peuvent les briser ou les ébrécher), mais tellement différents de ce que l’industrie automobile sportive propose habituellement.

Au départ, la pédale surprend un peu, comme avec des freins de compétition. Mais on est très vite en pleine confiance, quel que soit le rythme choisi. A petite allure ou en croisière, pourtant, la voiture n’a pas d’atouts particuliers. Ainsi menée, la GT-R Nismo ne distille pas de sensations folles, et impose d’intégrer assez vite ses dimensions extérieures généreuses. Le fonctionnement de la boîte n’est pas en question, mais affiche une modeste douceur en conduite coulée. Mais pourrait-on demander à un proto du Mans d’être confortable dans la ligne droite des stands ? En fait, ce qu’aime cette japonaise, c’est aller vite et se faire mener à la baguette… Une fois poussée dans ses derniers retranchements, elle est bien meilleure, générant des sourires et des périodes de doute tellement ça va vite. A certains moments, sur circuit, il faut s’en remettre à elle, lui faire confiance. Mais si elle perd l’adhérence des quatre roues, ce sera la faute du pilote, qui n’a pas fait assez preuve d’engagement pour la contrôler et la maintenir en piste.

Communicative, la GT-R téléphone tout de la chaussée, du niveau d’adhérence et de la position des roues. Mais elle ne s’est pas (encore) affranchie des lois de la physique. Toutefois, à très haute vitesse, elle semble imperturbable et se conduit de la même manière à 50 km/h qu’à 250 km/h. C’est à la fois bluffant et dangereux pour le non-initié. Pas le genre d’engin à confier à un adolescent en conduite accompagné… mais que tous les ados adorent pour son dessin de voiture de manga. Pour le reste –la conduite émotionnelle, la sportivité, l’attachement, la communion avec l’engin- la GT-R est un jouet pour grand enfant désireux de développer une relation intime avec leur machine. Et ça, c’est très, très bon.

Didier LAURENT

Les plus
Le look, qui va au bout de la démarche
Une voiture impressionnante en tous points
Une vraie voiture de course

Les moins
Compliqué de l’utiliser au quotidien
Bruit moteur/échappement peu démonstratif
Style intérieur vieillot 

FICHE TECHNIQUE – Nissan GT-R Nismo 2020

Moteur

Type (position) : 6 cylindres en V, biturbo

Position : longitudinale avant

Distribution : 4 soupapes par cylindre

Injection : directe essence

Cylindrée :  3 799 cm3

Puissance : 600 ch à 6 800 trs/mn

Couple : 652 Nm entre 3 600 et 5 600 trs/mn

Régime maxi : 7 100 trs/mn

Châssis 

Type : aluminium, acier et carbone

Freinage AV : disques carbone céramique (419 mm, 6 pistons)

Freinage AR : disques carbone céramique (390 mm, 4 pistons)

Suspensions AV/AR : indépendantes pilotées

Transmission : intégrale permanente

Boîte de vitesse : automatique à double embrayage, 6 rapports

Dimensions 

Long / Larg / Haut (mm) : 4,69 x1,90/1,37

Empattement (mm) : 2,78 m

Pneumatiques : 255x40R20 (AV) ; 285x35R21 (AR)

Réservoir (litres) : 74

Performances 

Vitesse de pointe (km/h) : 315

0 à 100 km/h (s) : 2,8

Conso mixte (litres/100 km) : NC

Prix 

Neuf (euros, à partir de) : 210 000

Galerie photos Nissan GT-R Nismo

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