Formula E : un début de saison à sensation !

Le championnat du monde de Formula E a démarré avec deux E-Prix aux portes de Riyad, en Arabie Saoudite. Les Mercedes ont brillé lors de la première journée, mais le lendemain elles ont été coupées dans leur élan par un mystérieux accident. Explications.

Il se passe toujours quelque chose dans ce championnat de monoplaces électriques lancé fin 2014. Il s’agissait par exemple des deux premières courses à se dérouler de nuit. La Formula E n’a rien inventé, la F1 l’a fait il y a plus de 10 ans à Singapour. Mais la piste était ici éclairée par 600 puissants projecteurs utilisant des LED de nouvelle génération. Elles sont présentées comme deux fois moins énergivores qu’un système d’éclairage classique et sont alimentées par de l’électricité renouvelable.

Autre démarche qui s’inscrit dans la politique « écolo » du championnat, la réduction de l’allocation de pneus. Les pilotes ont désormais le droit d’utiliser non plus 8 mais 6 pneus (3 AV et 3 AR) pour une course simple, et 8 pneus au lieu de 16 lors des double-headers, comme c’était le cas sur le circuit d’Ad-Diriyah.

Moins de pneus en Formula E

Selon les organisateurs, cela permettrait d’éviter de fabriquer 720 pneus dans la saison, et une réduction des émissions de CO2 à hauteur de 50 tonnes. Ce qui est appréciable, mais qui créée tout de même quelques sueurs froides au sein des écuries. Car lorsqu’en jour 1 une voiture sort de la piste en essais et qu’il faut remplacer un ou deux pneus, cela compromet la stratégie du week-end. D’autant qu’en Formula E les pneus doivent tenir toute la journée de course : essais, qualifications et E-Prix.

during Diriyah E-Prix 2021 – Diriyah, Saudi Arabia – 24/02/2021 © Jerome Cambier / MICHELIN

« Ici, à Riyad, les pneus ont tenu leurs promesses, aussi bien en termes de performances dans la durée que de longévité », indique Jérôme Mondain, le manager de Michelin en Formula E. « Malgré la réduction importante du nombre de pneus autorisés, les pilotes ont pu continuer d’attaquer en toute confiance. La piste bénéficiant d’un asphalte neuf, nous nous attendions en revanche à de potentielles remontées d’huile dans le bitume après quelques séances de roulage. Mais ce phénomène n’est pas survenu, et nous avons pu constater qu’entre les progrès réalisés par les voitures, la constance du pneu et l’augmentation du grip, les temps au tour avaient été tirés vers le bas. C’est vrai qu’avec 8 pneus par voiture pour couvrir deux journées de course le droit à l’erreur est mince. Mais, comme toujours, nos équipes sont au chevet des écuries. »

C’est vrai qu’avec 8 pneus par voiture pour couvrir deux journées de course le droit à l’erreur est mince.

Jérôme Mondain, manager de Michelin en Formula E

Notons tout de même que plusieurs voitures ont pris le départ de la première course, le vendredi 26 février, avec des crevaisons lentes pour préserver les stocks… Généralement, les crevaisons naturelles n’existent pas en Formula E. Les problèmes surviennent lors d’accident, ou alors en roulant sur des débris de carbone laissés sur la piste par d’autres voitures.

Après une première journée de course largement dominée par les Mercedes, le premier des deux E-Prix a été remporté par Nyck de Vries, suivi d’Edoardo Mortara, dont la Rokit Venturi Racing est elle aussi équipée d’un groupe motopropulseur de la marque à l’étoile. Mitch Evans (Jaguar Racing) occupe la troisième marche du podium.

Edoardo Mortara (CHE), Venturi Formula E during Diriyah E-Prix 2021 – Diriyah, Saudi Arabia – 25/02/2021 © Jerome Cambier / MICHELIN

Mais si Nyck de Vries a remporté les essais libres et les qualifications et n’a jamais été inquiété en course, Mortara reste l’homme du week-end, et ce pour diverses raisons . Le vendredi, en marge de la course solide qu’il a pu mener, le pilote italo-suisse a été l’auteur d’un dépassement de toute beauté, entre deux voitures, qui restera dans les mémoires du championnat.

Un crash terrible pour la Formula E

Mais le lendemain, c’est pour un fait de piste tout aussi spectaculaire qu’il se fera remarquer, avec un tout autre résultat… A l’issue de la troisième séance d’essais libres, le pilote Venturi s’est retrouvé sans frein alors qu’il effectuait une simulation de départ. A pleine vitesse, au bout de la ligne droite, sa Venturi a tiré tout droit dans le mur.

Extrait rapidement de sa voiture par le personnel médical, il sera évacué à l’hôpital, conscient mais très secoué. Il reviendra en fin de journée, souhaitant « oublier au plus vite ce qui s’était passé pour se concentrer sur la suite ». Sauf que la suite immédiate a pris des allures de sanction, quand la FIA a interdit à toutes les voitures équipées de moteur Mercedes de prendre la piste pour les qualifications !

Une mesure de précaution, le temps de trouver la panne, puis de la réparer, tout étant électronique sur ces monoplaces futuristes. Même le système de freinage est « by wire », autrement dit sans liaison mécanique entre la pédale et les étriers de frein.  il s’agissait alors de trouver l’origine de la défaillance, puis de faire une mise à jour du logiciel qui gère le freinage. Ce qui fut fait pour la course, mais le pauvre Mortara, bien secoué, ne prendra pas le départ. Sa monoplace n’était de toute façon pas prête à reprendre la piste 

Feux d’artifice en Formula E mais pas seulement…

C’est alors un E-Prix bizarre qui s’est mis en place. Même sur la ligne de départ, le silence est de mise. A l’extinction des feux, le poleman Robin Frijns (Envision Virgin Racing) conserve sa position. En revanche Sam Bird (Jaguar Racing) surprend Sergio Sette Câmara (Dragon/Penske Autosport) et s’installe à la 2ème place.

Sérgio Sette Câmara est nouveau en Formula E, mais il a déjà démonté une belle aisance.

En fond de grille, on retrouve les 2 Mercedes, la Venturi de Nato, mais aussi la Porsche de Lotterer, qui n’a pas participé aux qualifications suite à une sortie de piste en essais. Le triple vainqueur des 24 Heures du Mans, qui avait signé un joli podium au même endroit l’an dernier, a cette fois-ci eu plus de mal à exprimer son talent. « On a fait quelques erreurs, j’aurais aimé démontrer que la voiture avait progressé, indique le pilote allemand. Il faudra se mobiliser pour la prochaine course, car nos résultats ne reflètent pas notre niveau. »

La veille, c’étaient les deux DS Techeetah de Jean-Eric Vergne et Antonio Felix Da Costa qui avaient raté leur E-Prix. L’écurie tenante des deux titres (dont celui des Pilotes pour Da Costa) avait pris le départ du fond de grille après des qualifications douloureuses, puis s’était montré un peu molle pendant la course.

Jean-Eric Vergne (DS Techeetah) lors de la séance d’essais libres, qui s’est déroulée de jour.

Mais une prise de conscience a dû faire son chemin dans la tête des protagonistes, car les deux hommes se sont démarqués par une belle remontée commune, comme ils en ont le secret. Très –voire trop ?- enthousiastes, ils se sont même touchés, et ne sont pas passés loin de ruiner leur course.

A la fin d’un e-Prix finalement remporté par Sam Bird, devant Robin Frijns (Envision Virgin Racing) et Da Costa (Vergne avait passé la ligne d’arrivée en 3ème position mais sera déclassé pour ne pas avoir utilisé son second mode Attack), on attendait le traditionnel feu d’artifice qui marque la fin du week-end de course.

Mais, juste avant des éclairs ont déchiré le ciel saoudien, avec des bruits très sourds, comme s’il s’agissait d’explosions. Effectivement… tout se vacarme était dû à une intervention de l’armée saoudienne. Elle venait d’intercepter des missiles et des drones envoyés par les rebelles Outhis, soutenus par l’Iran dans le cadre du conflit avec le Yemen. Ambiance… Le lendemain, l’aéroport était fermé, et Riyah était devenue une « no fly zone ». Pendant de longues heures, nous avons pensé devoir rester sur place pendant plusieurs jours. Puis la situation s’est débloquée, comme la semaine précédente, selon les explications de la presse locale.  

La prochaine manche du championnat du monde de Formula E se déroulera le 10 avril à Rome (Italie). La course sera là aussi à huit clos, certainement avec moins d’événements dans le ciel.

LES RESULTATS

E-Prix numéro 1 – vendredi 26 février

1. N. de Vries (Mercedes-Benz EQ) en 46’44’’765,

2. E. Mortara (Rokit Venturi Racing) à 4’’12,

3. M. Evans (Jaguar Racing) à 4’’62,

4. R. Rast (Audi Sport Abt Schaeffler) à 4’’85,

5. P. Wehrlein (Tag Heuer Porsche Motorsport) à 5’’96,

6. O. Rowland (Nissan e.dams) à 9’’32,

7. A. Sims (Mahindra Racing) à 9’’69,

8. S. Vandoorne (Mercedes-Benz EQ)à 9’’97,

9. S. L. di Grassi (Audi Sport Abt Schaeffler)à 11’’90

10. O. Turvey (NIO 333) à 15’’52.

Meilleur tour : S. Vandoorne 1’09’’583

E-Prix numéro 2 – samedi 27 février

1. S. Bird (Jaguar Racing) en 39’50’’836,

2. R. Frijns (Envision Virgin Racing) à 2’’19,

3. S. A.F. Da Costa (DS Techeetah) à 6’’90,

4. S. Sette Câmara (Dragon/Penske Autosport) à 12’’82,

5. N. Müller (Dragon/Penske Racing) à 13’’92,

6. O. Turvey (NIO 333) à 15’’52,

7. O. Roland (Nissan e.dams) à 16’’39,

8. L. Di Grassi (Audi Sport Abt Schaeffler) à 20’’61,

9. N. de Vries (Mercedes-Benz EQ)à 22’’48

10. P. Wehrlein (Mercedes-Benz EQ) à 25’’40.

Meilleur tour : N. de Vries (1’08’’811)