Circuit Paul Ricard, 50 ans de souvenirs F1, notamment…

Parce que j’ai eu la chance d’embrasser très fort, trop peut-être, mon métier de journaliste, je vis depuis plus d’un demi-siècle déjà en témoin privilégié et heureux au rythme d’événements auto et moto souvent exceptionnels, de l’essai d’un VéloSolex à celui d’une Formule 1 tout ce qui fait vroum vroum m’intéresse.  Malgré la crise sanitaire, qui crée un contexte on ne peut plus étrange et hermétique, 50 ans après avoir vécu en tant que reporter-photographe et dans une pure ambiance de folie mon premier Grand Prix F1 sur le circuit Paul Ricard en juillet 1971, nous voilà avec le talentueux photographe Raymond Papanti et quelques une de ses archives au 61e #FrenchGP.

A l’initiative de Denis Carreaux, Directeur des Rédactions du Groupe Nice Matin (Var Matin, Nice Matin, Monaco Matin), mon confrère Laurent Seguin m’a passé à la question et cela a fait ressurgir quelques souvenirs parmi tant d’autres, plus particulièrement liés à la F1. Les voici les voilà, juste pour le plaisir. Un plaisir qui serait quasi-absolu si Jules Bianchi était encore parmi nous ! Mais avec des si…

Renault m’installe dans le baquet d’une F1

Il y a quelques années, alors que je roulais vers mes 60 printemps, grâce à Renault F1 Team et à l’opération «Feel it», j’ai même été installé dans un baquet et conduit une Formule 1 sur le circuit Paul Ricard. Je n’ose dire que je l’ai pilotée. Une preuve ? Mon meilleur chrono le matin en Formule Renault s’était avéré 7 secondes moins lent qu’au volant de la belle replica très assagie de la voiture de Fernando Alonso. Tout de même bourrée de quelque 800 chevaux la bête ! Fort heureusement la demi-journée de préparation, avec tests de réflexes etc… était là pour aider les impétrants à rester calmes et humbles. Une expérience inoubliable, of course !

Les pneus de Schumi pour la Fiesta du Soleil…

La simplicité, les pilotes de GPF1 savent en faire preuve pour peu qu’on ne les importune pas au mauvais moment ou au mauvais endroit. Tel Michael Schumacher qui, en 1994 chez Benetton-Ford, était en route pour son premier titre de Champion du monde de Formule 1. A la veille de la Fiesta du Soleil, une authentique kermesse dans les stands du circuit Paul Ricard dont le premier face à la direction de piste était le « Bar de la Piste », complétée par un 10km, et un Marathon pédestre doté d’une Ferrari si le record de France était battu – le futur Baron Rouge avait de bonne grâce offert des pneus Goodyear Eagle F1 dédicacés pour la tombola.

Jody Scheckter emprunte mon bermuda

Au milieu des années 70, alors membre de l’Elf Team Tyrrell, le Sud-Africain Jody Scheckter – qui allait être sacré Champion du monde en 1979 chez Ferrari – participait, la veille du Grand Prix de France, à une course de vélos sur le circuit Paul Ricard. J’étais en train d’immortaliser les préparatifs de l’affrontement lorsque Jody, qui était vêtu d’un blue jean, est venu me demander de lui prêter mon bermuda pour la course. En quelques secondes, la grille de départ est devenue notre vestiaire…

Bernard Cahier me confie la loge VIP Goodyear !

Le regretté Bernard Cahier, l’un des journalistes et photographe F1 les plus en vue pendant trois décennies dès le début des années 50 – dont le fils Paul-Henri est le digne héritier -, était très lié à Goodyear. Un jour, entre la poire et le fromage il me demande si je me sens capable de m’occuper de l’aménagement de la loge VIP Goodyear du circuit Paul Ricard pour le Grand Prix 1973. Evidemment je dis oui sans même réfléchir. «Tu as financièrement carte blanche me dit-il». Résultat, me voilà designer sans le savoir, acquéreur de dizaines de mètres de moquettes et de revêtements bleus et jaunes Goodyear, d’un bar, de frigos, de canapés et de fauteuils aux couleurs du manufacturier américain en pneumatiques. En ce qui concerne les liquides destinés aux invités, grâce à la Société Ricard rien n’a manqué !

Les essais secrets du moteur Renault F1 Turbo

A l’inter-saison 1975-76 si ma mémoire est bonne, Marie-Claude Beaumont, vient rouler au circuit Paul Ricard avec un Prototype 2 Litres du Championnat d’Europe. Le moteur fait un bruit différent par rapport à ceux de la concurrence… Curieux de nature mais loin d’être un technicien, j’essaye de voir ce qui se passe sous le capot et l’on m’en empêche, jusqu’au moment où… Je découvre un moteur équipé d’un truc bizarre, c’est un turbo. Le moteur est celui sur lequel travaillent conjointement les ingénieurs de Renault, et d’Alpine à Dieppe, pour donner naissance au fameux V6 1.5 Litres aligné par Renault dès 1977 en F1 aux mains de Jean-Pierre Jabouille. Le Losange révolutionne alors le monde des motoristes.

Les tests aérodynamiques de Copersucar

Pendant l’hiver 1976-77, Emerson Fittipaldi débarque au circuit Paul Ricard pour des tests aérodynamiques avec la nouvelle Copersucar-Ford, dont le nom provient du support financier que lui accorde le Groupement des Coopératives sucrières brésiliennes. Mais ne possédant pas de veine de soufflerie, l’équipe sud-américaine fait preuve d’inventivité à peu de frais mais nécessitant beaucoup de patience. Elle appose des centaines de brins de laine de différentes couleurs sur la carrosserie et filme sous tous les angles les séances de roulage avec une caméra à grande vitesse. Ingénieux !

Un kartman nommé Prost et des records à moto

Je pourrais aussi évoquer l’épreuve mondiale de kart disputée en 1974 sur un tracé qui empruntait la ligne droite des stands et la voie des stands elle-même. Un certain Alain Prost y participait… mais elle fut remportée par un pilote belge.
Que de souvenirs vécus dans l’enceinte du circuit Paul Ricard, où avec Jacques Luc pilote moto professionnel et chef de piste, nous avons été les premiers, en 1977, à franchir en 24 heures le cap des 3000km à moto sur une 900 Kawasaki Goodier-Genoud. En pulvérisant au passage les records de distance et de vitesse sur 6h, 1000km et sur 12h, sous les ailes protectrices et le génie de la mécanique de Georges-Godier, d’Alain Genoud et de Serge Rosset.

Le jour où Paul Ricard a failli exploser sa télévision…

Des pans de vie et des fêtes mémorables au circuit Paul Ricard et autour, en particulier au restaurant-hôtel Club Trans Yachting Cercle de Jacky Lubrano où officiait avec bonheur Féfé, là où se trouve aujourd’hui l’Hôtel du Castellet. Et jusque chez Paul-Ricard, dans sa demeure de La Tête de l’Evêque qui surplombe le circuit. Où, en 1973, j’ai bien cru que le boss allait exploser sa télévision alors que nous suivions en direct l’allocution de Pierre Messmer, premier ministre, dans laquelle il réclamait l’interdiction du sport automobile. Le crise pétrolière avait déjà bon dos, aujourd’hui l’écologie lui a diaboliquement succédé !

Charles-Bernard ADREANI
Photos : Raymond PAPANTI
et Archives L’Agenda de l’Automobile

La F1 au circuit Paul Ricard dans le viseur de Raymond Papanti

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